Vous êtes nombreux à me faire part du même problème : une fois que vous avez trouvé la plante que vous cherchiez, que vous l’avez identifiée et que vous savez l’utiliser… Vous n’osez pas la manger.
Parce que vous n’êtes pas 100% sûr que le site soit sain, parce que vous avez peur que ça vous rende malade…
C’est tout à fait normal !
Vous avez bien raison de vous interroger. Il y a naturellement du nitrate dans l’eau, l’air ou le sol. Néanmoins, lorsqu’on en trouve une grande quantité accumulée au même endroit, il vaut mieux passer son chemin.
Comment savoir si notre site de cueillette est sain ?
C’est difficile de jauger la qualité d’un sol… Quand on est dans son propre jardin, on sait bien quel engrais a été utilisé, et on peut cueillir les plantes qui y poussent les yeux fermés !
Mais c’est bien plus délicat de récolter des fleurs dans un endroit qu’on ne connaît pas… On ne sait pas ce que le sol a vécu auparavant et c’est plus difficile de juger la qualité de l’environnement.
Par chance, il existe des moyens rapides et simples pour se faire une idée de la qualité d’un champ.
En fait, en observant les plantes qui poussent naturellement dans un milieu, on peut se faire une bonne idée de la qualité et des caractéristiques d’un sol. Puisque chaque plante a un milieu de prédilection, la présence d’une plante nous renseigne sur les composants de la terre.
Des plantes comme indice de qualité de sol
Le grand spécialiste des plantes et des indications qu’elles donnent sur le sol dans lequel elles poussent est Gérard Ducerf, il s’est fait connaître grâce à son livre « Les plantes bio-indicatrices : guide de diagnostic des sols ».
C’est un livre très complet et détaillé, qui analyse de près les habitudes de nombreuses espèces !
Dans son livre, Gérard Ducerf observe que la présence en grande quantité d’une certaine espèce ne dépend pas uniquement du fait qu’elle dissémine bien ses graines. Ce qui, selon lui, est très important, ce sont les conditions de « la levée de dormance »[1].
Pour l’expliquer simplement, c’est l’idée selon laquelle une petite graine va cesser de dormir afin de germer uniquement si ses conditions environnementales lui conviennent. Si ce n’est pas le cas, la graine ne germe pas et reste en dormance.
Et ces conditions sont différentes selon les espèces.
Un coquelicot apprécie l’ombre des blés, il ne poussera pas dans les mêmes milieux qu’une berce. Une reine des prés, quant à elle, aime avoir de l’eau à proximité de ses racines. Elle ne poussera pas au même endroit que le thym serpolet, etc.
L’humidité et l’exposition au soleil ne sont pas les seuls facteurs décisifs. La nature du sol constitue un aspect primordial.
Observez quelle plante domine, elle vous dira ce que contient le sol
Il est possible de considérer qu’une plante est bio-indicatrice seulement si l’espèce est dominante. C’est-à-dire, qu’elle soit en grand nombre à un endroit, que ce soit l’espèce la plus représentée et pas uniquement un individu isolé.
Ces espèces bio-indicatrices donnent des informations sur le type de sol dans lequel elles poussent.
Les renoncules − que d’autres appellent « boutons d’or » − préfèrent les sols argileux, tout comme les chardons. La pâquerette s’installe elle-aussi sur des sols argileux, mais qui ont tendance à être acides.
Le fait qu’une population de plante élise domicile en grand nombre à un endroit n’est pas toujours lié au type de sol, un dérèglement dans le sol peut également en être la cause.
Les plantes bio-indicatrices permettent de rééquilibrer les sols en se nourrissant des nutriments qui s’y trouvent en excès. D’une certaine manière, elles sont à la fois le symptôme et la solution à un déséquilibre.
Les plantes qui indiquent un dérèglement
Un sol qui contient trop d’azote est un terrain propice pour les trèfles blancs, car les trèfles sont connus pour « fixer » l’azote dans la terre.
Dans les sols « pauvres », en perte de micro-nutriments et dans lesquels on trouve une accumulation de matières végétales inertes, il n’est pas rare de voir fleurir du gaillet gratteron. Il est très reconnaissable, avec sa tige carrée et ses feuilles verticillées.
La présence du gaillet indique que le sol est pauvre, mais dans un même temps, cette plante apporte des micronutriments au sol et l’enrichit.
Comme le gaillet gratteron, la chélidoine indique que le sol est appauvri, mais qu’en plus, il contient des nitrates. Les exploitations agricoles qui ne produisent pas du BIO en utilisent pour pulvériser les champs.
Lorsqu’elle n’est pas encore en feuille, on la reconnaît à son latex orange ainsi qu’à ses folioles crénelées. En phytothérapie, la chélidoine aide à éliminer les déchets au niveau des reins, et elle fait pareil avec le sol.
Méfiez-vous aussi si vous apercevez des parterres d’orties trop compacts et étendus, en bord de chemin de fer ou en bordure de champ cultivé, non-biologiques. Elles s’installent en colonie dans les sols saturés de nitrates pour les nettoyer.
Les engrais et fertilisants chimiques ne sont pas les seules sources de pollution dont il faut se méfier. Vers les chemins de fer, de nombreux herbicides sont pulvérisés pour que le rail ne soit pas envahi par la végétation. Il vaut mieux éviter ces zones pour la cueillette.
Si vous voyez cette plante, cueillez sans hésiter
Heureusement, il n’y a pas que des plantes friandes d’azote ! Certaines espèces indiquent un sol en bonne santé, équilibré et riche en nutriments.
Si vous les apercevez, vous pouvez vous fier à votre site de cueillette. 😊
Parmi ces « bonnes » plantes, on retrouve notamment le mouron des oiseaux. Cette petite plante discrète, aux fleurs blanches, indique que le sol possède un bon équilibre bactérien.
Si vous apercevez un salsifis, c’est bon signe ! Il ne s’épanouit que dans les prairies sauvages, dont le sol est bien équilibré. S’il est en compagnie du plantain, c’est un gage de bonne qualité du champ, vous pouvez vous servir les yeux fermés pour votre cueillette !
Bien sûr, ce ne sont que quelques exemples ! Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de salsifis dans un pré que la terre est polluée ! 😉
J’espère néanmoins que ces quelques indices peuvent en rassurer certains !
Et vous, à quoi vous prêtez attention lorsque vous cueillez vos plantes ?
N’hésitez pas à me faire part de vos astuces, je suis curieuse de les connaître !
À très vite,
Mathilde Combes