yaourt maison

Un jour j’ai lu le livre fantastique d’un éleveur : il y parlait de ses bêtes, de la qualité de leur lait, et du goût de ses fromages, ses yaourts, ses crèmes…. C’est depuis ce livre que je me suis mise à faire mes yaourts moi-même.

L’homme raconte à quel point il a été marqué par le goût du vrai lait :

« La première fois que j’ai bu du lait cru, ce fut lors d’une visite à une communauté.  Comme la première fois où j’ai bu de l’eau de source ou mangé des légumes du jardin : j’étais fasciné. La supériorité du lait cru frais sur son équivalent industriel est telle qu’il m’a gâté pour toujours »  [1]

Alors j’ai essayé le lait cru, à boire mais aussi en yaourt.

Et c’était vraiment bon !

Voici pourquoi l’utiliser et comment.

On n’utilise presque plus de lait cru (et on a tort)

Dans les villages, avant, c’est avec du lait cru qu’on faisait les yaourts, les fromages, les caillés…

lait village

Dans un récipient en terre cuite, dans une calebasse en fer, dans un tonneau en châtaignier…

C’est grâce aux bonnes bactéries qu’il contient qu’on pouvait conserver le lait et produire des fromages, des yaourts, avec un goût typé et riche :

–    D’une meilleure qualité microbienne, puisqu’on ne « sélectionne » pas artificiellement certaines souches après avoir pasteurisé : on les laisse toutes vivre, et poursuivre leur activité symbiotique jusque dans nos intestins
–    D’un meilleur goût (presque « sucré », rond, bien moins acide que le lait pasteurisé)
–    D’une texture plus crémeuse (plus lisse en bouche)

Aujourd’hui, les fabricants ne font plus ça. Trop compliqué, trop long à produire, trop cher… Ils pasteurisent un lait d’une qualité aléatoire à haute température, avant d’y réinjecter des souches de bactéries uniformisées, fabriquées en laboratoire.

En termes de goût… y a pas photo, c’est infiniment moins bon !

C’est mieux quand c’est vivant !

forêt vivante

La différence entre ces deux laits, c’est un peu comme celle entre une forêt primaire et une forêt de hêtres plantée. D’un côté vous avez laissé les espèces grandir à leur rythme, en s’aidant les unes les autres : les plantes grimpantes vers les cimes, pour abriter les insectes, les arbres pour garder l’humidité de la forêt, les plantes couvrant sol pour ameublir la terre… Toutes travaillent ensemble à garder la forêt habitable, fertile, accueillante et pérenne. L’équilibre et la santé de la forêt se maintiennent grâce à la diversité. 

De l’autre, vous avez planté des espèces que vous savez résistantes, bien alignées, exactement à la même distance les unes des autres, parce que vous savez que ça produira plus. Problème : vous rendez moins résistants vos arbres, plus fragiles aux attaques extérieures. Vous appauvrissez le sol, ses nutriments, sa population naturelle d’insectes, d’oiseaux, de plantes…

Le lait et le yaourt c’est exactement pareil.

Le yaourt industriel au lait pasteurisé est reproductible à l’infini, très rapidement, mais les bactéries qu’il contient sont réduites au strict minimum. Cela donne un yaourt sans « richesse », « non-vivant ».

Lait mort

L’avantage avec la stérilisation c’est bien sûr que le lait se garde plus longtemps. Mais en supprimant tout risque de développement de pathogènes, on tue aussi toutes les « bonnes » choses qu’il y avait dans le lait vivant :

–    Les bonnes bactéries lactiques comme Lactobacillus acidophilus, qui enrichissent la flore intestinale et aident à bien digérer. On leur prête en ce moment tout un tas de bienfaits : immunité, confort respiratoire… La liste est longue [2]

–    Les vitamines, les minéraux et les enzymes naturels [3] : la vitamine D et la vitamine B en particulier, le phosphore et les enzymes digestives. Plus le lait est de mauvaise qualité, et plus on le chauffe, plus on « dégrade » ses nutriments.

Et maintenant les marques sont de plus en plus nombreuses à rajouter des nutriments après stérilisation dans leurs yaourts ! Un comble !

yaourt industriel

Le meilleur moyen de ne pas avaler du lait de mauvaise qualité…

Si l’industrie laitière est obligée de pasteuriser, c’est qu’elle utilise un lait de mauvaise qualité.

« L’industrie laitière excelle à produire du lait à bas prix, mais pour y parvenir, la surface par animal est minimisée et on emploie des moyens exceptionnels comme les hormones des croissance artificielles pour augmenter la production. Malheureusement, elles compromettent la qualité du lait. Si nous devons boire ce lait, il vaut mieux le pasteuriser à cause de nombreuses cellules somatiques (pus dans le lait à cause des blessures sur les pis) et de nombreux colibacilles. » [4]

La solution, c’est de choisir son lait cru avec attention et de fabriquer ses propres produits laitiers à base de ce lait-là.

Et c’est tout à fait possible.

Je fais mes yaourts moi-même, maintenant

Mon lait vient de la ferme du Sapalet, à juste 1h de chez moi. Je sais que leurs brebis et leurs vaches grandissent en mangeant de la bonne herbe, dehors une bonne partie de l’année.

Vous avez forcément une ferme de ce type-là près de chez vous. Si non, vous trouverez sûrement ces produits dans les magasins spécialisés, la marque Déméter en produit à plutôt grande échelle (c’est moins bon qu’à peine sorti de la ferme, mais il est très bien quand même).

J’ai tenté plusieurs recettes à base de ce lait cru là. Après quelques ajustements (température, temps de repos, sucre ou pas sucre) je pense que je suis arrivée au résultat qui me plait 🙂

Ferme mais pas trop ; parce qu’avec avec du lait cru, c’est toujours moins compact.

Franchement, c’est délicieux.  Et ça se garde très bien au frigo. J’utilise une cuillère à soupe de yaourt de la fournée précédente à chaque fois que je veux en refaire une nouvelle.

A très vite,

Mathilde Combes

Sources :

[1] Sandor Ellix Katz Fermentations, Terre vivante, 2018 (Traduction française), pages 215-220

[2] Syngai, Gareth Gordon et al. “Probiotics – the versatile functional food ingredients.” Journal of food science and technology vol. 53,2 (2016): 921-33. doi:10.1007/s13197-015-2011-0
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4837740/

[3] Unpasteurized MilkThe Hazards of a Health FetishMorris E. Potter, DVM; Arnold F. Kaufmann, DVM; Paul A. Blake, MD; Roger A. Feldman, MD, JAMA. 1984;252(15):2048-2052. doi: 10.1001/jama.1984.03350150048020

[4] Sandor Ellix Katz Fermentations, Terre vivante, 2018 (Traduction française), pages 215-220