Je ne sais pas pour vous, mais pour moi, l’automne, c’est la saison du gratin qui dore au four, de la soupe onctueuse, de la bonne purée au beurre… Bref, le retour en grâce de la pomme de terre ! 😊

En préparant un plat ce week-end, je me suis fait cette réflexion : on la tient tellement pour acquise qu’on a l’impression qu’elle a toujours fait partie de notre histoire.

Par simple curiosité, j’ai voulu savoir d’où elle venait et comment elle était arrivée jusqu’à nous.

Et là, surprise : je suis tombée sur une histoire incroyable, pleine de méfiance, de ruse et de marketing de génie !

Le légume que tout le monde détestait

Difficile à imaginer aujourd’hui, mais il y a 250 ans, personne en France ne voulait de ce légume.

Venu des Andes, il a mis près de deux siècles à s’imposer chez nous.

On le trouvait laid.

Pire, comme il poussait sous terre, on l’associait  au diable et aux maladies, l’accusant même de transmettre la lèpre !

On la surnommait la « pomme du diable » et on la cultivait au mieux pour ses jolies fleurs, ou pour nourrir les cochons et les prisonniers.

Et c’est justement en prison qu’un homme va avoir une révélation.

L’homme qui a dupé tout Paris

Cet homme, c’est Antoine-Augustin Parmentier.

Pharmacien des armées pendant la guerre de Sept Ans (vers 1760), il est fait prisonnier en Prusse. Sa seule nourriture pendant des mois ?

Cette fameuse « bouillie pour les cochons ».

Non seulement il ne meurt pas, mais il ne tombe même pas malade.

Il reste en parfaite santé.

Il comprend que ce tubercule pourrait être la solution aux famines terribles qui ravagent la France.

De retour à Paris, il n’a qu’une mission : faire adopter la pomme de terre.

Mais il se heurte à un mur de préjugés.

Le peuple la rejette, l’Église s’en méfie.

Parmentier comprend qu’il ne peut pas combattre la superstition populaire avec de simples mots.

Il doit utiliser la science.

L’occasion parfaite se présente en 1772.

L’Académie de Besançon, composée de scientifiques et d’esprits éclairés, lance un concours sur les « aliments de substitution » en cas de disette.

Parmentier rédige un mémoire brillant, un véritable dossier scientifique (l' »Examen chimique de la pomme de terre » ), où il prouve sa valeur nutritive et démonte, argument par argument, les peurs sur la maladie.

Face à cette démonstration rationnelle, les académiciens sont convaincus : il gagne le prix haut la main.

Cette victoire lui donne la crédibilité nécessaire pour obtenir l’oreille du roi Louis XVI.

Convaincu (et inquiet des famines), le roi lui octroie alors une parcelle de terre réputée « incultivable » dans la plaine des Sablons (près de Paris) pour qu’il puisse y faire ses démonstrations.

La campagne de promotion commence

C’est là que le “génie marketing” de Parmentier explose.

Son premier coup est pour la Cour.

Il cueille les jolies fleurs de sa plantation et en offre un bouquet au roi.

La reine Marie-Antoinette, charmée, en pique une dans ses cheveux.

C’est un succès immédiat : la pomme de terre est à la mode 😊

Parmentier s’empresse d’offrir les fleurs de pommes de terre à Louis XVI et Marie-Antoinette alors à la promenade à Versailles (Gravure, Le Petit Journal, mars 1901)

Son deuxième coup est pour le peuple.

Il fait garder son champ des Sablons par des soldats armés le jour, laissant croire qu’une récolte d’une valeur inestimable y pousse.

Mais la nuit, il retire volontairement les gardes.

Le plan fonctionne à merveille.

Persuadés qu’il s’agit d’un mets de luxe réservé au roi, les paysans et les curieux viennent voler les précieux tubercules pendant la nuit pour les planter dans leurs propres jardins !

Et voilà comment, grâce à un prisonnier devenu scientifique, puis à un stratège de génie, Parmentier a brisé les préjugés 😊

Il n’a pas vu de son vivant la pomme de terre devenir l’aliment de base que l’on connaît (ce sont les famines de la Révolution qui finiront le travail), mais il a lancé le mouvement.

Il a mis la « pomme du diable » sur la voie pour devenir le légume le plus réconfortant de nos assiettes, sauvant des peuples entiers de la faim.

Est-ce que vous connaissiez cette histoire autour de la pomme de terre ?

Est-ce que ce format de lettre vous plaît ? Dites-le moi en commentaire ici.

A très vite,

Mathilde Combes

PS : Et si vous pensez que le nom « hachis Parmentier » est une simple coïncidence… pas du tout !

C’est le plus célèbre hommage rendu à l’homme qui a popularisé la pomme de terre.

C’est même devenu un terme de cuisine : un « potage Parmentier » ou un « poisson Parmentier », c’est tout simplement un plat servi avec des pommes de terre ! 😉